LES LIENS DE LENNON ET McCARTNEY AVEC L’IRLANDE ET SA MUSIQUE

LES LIENS DE LENNON ET McCARTNEY AVEC L’IRLANDE ET SA MUSIQUE

17 novembre 2019 0 Par Génération Beatles

On a peu souligné qu’en plus de tout le reste, John Lennon et Paul McCartney avaient en commun des origines irlandaises. Et la mère de George Harrison était irlandaise. On sait à quel point la culture de l’île est imprégnée par la musique. La tragédie irlandaise inspirera deux des créations des ex-Beatles. Une occasion d’un rapide rappel de l’influence de la musique irlandaise sur le folk, le rock et la pop

Des musiciens et des Irlandais

Le grand-père paternel de John, qui portait le même prénom, même s’il se faisait appeler Jack et qui tenta sa chance aux Etats-Unis en interprétant des chansons américaines avec un certain succès (rien à voir bien sûr avec la réussite de son petit-fils) était né en 1855. Philp Norman (voir la rubrique Help) le raconte ainsi dès la première page de la biographie John Lennon Une vie (Points) : « Lennon est un nom de famille irlandais – dérivé de O’Leannain ou O’Lonain- et Jack citait généralement Dublin comme étant son lieu de naissance alors qu’il est prouvé que sa famille avait déjà traversé la mer d’Irlande quelques temps auparavant pour venir s’intégrer à la nombreuse communauté hibernienne (l’ile d’Irlande en latin, NDLA) de Liverpool. ».

Quant à Paul, même si son nom indique des origines écossaises, sa famille fit un passage par l’Irlande, venant d’Ecosse ou du Lancashire, les sources diffèrent (le Lancashire était la région de Liverpool et Manchester jusqu’en 1974). Au XIX° siècle, son arrière-grand-père paternel revient d’Irlande pour s’installer Liverpool. On connait les liens entre les peuples écossais et irlandais, et pas seulement par leur goût prononcé pour le whisky ni par le ferme ressentiment envers les Anglais : langue commune, le gaélique, musique et instruments identiques ou très proches, géographie et paysages.

Une enfance bercée par la musique

Paul raconte dans les « Conversations avec Paul Du Noyer, Des Mots qui vont très bien ensemble » Editions J’ai lu, (un autre Paul, liverpuldien aussi, journaliste et biographe) que son enfance a été marqué par la musique. Il y avait un piano (que Paul a conservé) dans leur petite maison de la banlieue de Liverpool. Son père, Jim, commercial dans une entreprise de commerce de coton, en jouait ainsi que de la trompette et il apprit des rudiments de piano à Paul. Jim, avec son frère Jack qui jouait du trombone, faisait partie d’un groupe amateur, le Jimmy Mac’s Jazz Band qui se produisait régulièrement. Paul ajoute que les nombreuses fêtes familiales qui faisaient oublier la difficile période de l’après-guerre, étaient l’occasion pour les participants de chanter, et plutôt bien, précise-t-il. Parmi les nombreuses chansons, outre les airs de music-hall, les chansons irlandaises figurent en bonne place. S’il allait s’en convaincre on écoutera sur les plateformes de streaming le « Liverpool Lou » de Patsy Whatchorn, un classique des groupes irlandais, qui vous transportera directement du Merseyside à l’atmosphère chaleureuse d’un pub de Dublin.

Massacre de janvier 1972 : Bloody Sunday

Le disque des Wings qui fut interdit de BBC

L’influence culturelle de la communauté irlandaise de Liverpool s’ajoutant à leurs propres racines, comment s’étonner des réactions de McCartney et de Lennon après la journée du « Bloody Sunday » du 30 janvier 1972 où quatorze personnes, principalement des adolescents, sont abattus par la police de Londonderry au cours d’une manifestation pacifiste ? Quelques semaines plus tard, fin février, Paul sort avec les Wings, « Give Ireland Back to the Irish », qui fut interdite d’antenne par la BBC, comme quelques concerts des Wings.

Quant à John, dans son album sorti en juin de la même année, son titre « Sunday bloody Sunday » dénonce le massacre.

Le verso de la couverture de l’album de Lennon « Some Time in New York City »

Chants irlandais mondialisés

L’influence musicale du répertoire irlandais sur le rock et la pop d’une manière générale s’explique par la forte immigration irlandaise, vers les Etats-Unis et l’Angleterre, au XIX° (la famine due à la crise de la pomme de terre) et XX° siècles. Dès les années 60 émergèrent dans le rock des musiciens irlandais : Van Morrison, Rory Gallagher, puis Thin Lizzy qui mêlera hard rock et musique traditionnelle irlandaise, (belle reprise du classique Whiskey in the Jar, comme le fit aussi Metallica) donnant naissance au rock celtique. En lien direct, n’oublions ni The Pogues inspirés par la musique folklorique irlandaise (inoubliable voix de Shane MacGowann à laquelle se joint celle de Kirsty MacColl dans Fairytale of New York) ni U2, le plus célèbre groupe irlandais qui nous gratifia d’un universel « Sunday Bloody Sunday ».

Les ponts culturels entre l’Irlande et l’Ecosse permettront – pour ne citer que lui – à Mark Knopfler, né à Glasgow, de nous offrir quelques jolis morceaux celtiques et un album d’inspiration folk celtique (Get Lucky).

Chants irlandais, le blues du nord

Fuyant la misère et la famine, les Irlandais exporteront donc cette musique celtique qui irriguera les chansons populaires des îles britanniques, puis celle des Etats-Unis. Comment ne pas en entendre ses joyeuses ou tristes harmonies dans la musique country, puis dans le folk. Au même titre que le blues et le jazz, l’Irlande a réellement à voir avec le rock. La mélancolie ou l’optimisme des chansons irlandaises nous renvoient à la souffrance ou à l’espérance des bluesmen noirs du sud des Etats-Unis, les inspirateurs les plus directs du rock.

Forts de toutes ces influences, les Beatles donneront un nouvel élan à la musique de leur siècle. Pour conclure cette lecture, on reviendra à l’écoute de la chanson de McCartney, Mull of Kintyre, dédiée à ce cap écossais qui fait face à l’Irlande et où il avait acheté une maison.