REPRISES / COVERS: ACROSS BEATLES UNIVERSE

REPRISES / COVERS: ACROSS BEATLES UNIVERSE

11 août 2020 2 Par Génération Beatles

Les deux-cent et quelques chansons des Beatles ont toutes sans exception fait l’objet de reprises par d’autres artistes. A elle seule Yesterday en compte plus de 3000. Cette période estivale devrait nous laisser un peu temps pour explorer quelques pistes, que chacun pourra emprunter et poursuivre selon ses propres goûts

Les puristes pourront considérer qu’une chanson des Beatles ne vaut que par l’interprétation de leurs créateurs. Ce n’est pas ce que pensaient les Fab Four qui saluèrent souvent des interprétations réussies de leurs titres. Avant d’être repris, ils ont beaucoup repris. A leurs débuts scéniques dans les petits clubs de Hambourg ou Liverpool, n’ayant aucune composition à leur actif, ils sont allés piocher dans les titres de leurs ainés souvent adulés en interprétant avec conviction et talent des morceaux sur lesquels ils avaient appris la guitare, le piano et le chant en autodidactes particulièrement doués.

Les Beatles ont largement inspiré leurs contemporains et leurs successeurs, qui leur ont bien rendu en reprenant leurs titres, tous leurs titres. En effet, toutes les chansons des Beatles ont fait l’objet de reprises par d’autres artistes, des plus grands au moins connus.

GenerationBeatles.blog livre un petit florilège de quelques incontournables (il y en a des centaines d’autres) en invitant chacun à faire ses propres recherches en fonction de ses appétences pour les chansons des Beatles ou pour ses interprètes préférés.

DES REPRISES HORS POP ROCK

Il y en a pour tous les goûts, aucun style de musique n’échappe à ces reprises-hommages, jazz, reggae, latino, y compris le chant lyrique, commençons par là.

Les Beatles en chant lyrique

On raconte que la chanteuse d’opéra Cathy Berberian grâce à sa fille fan des Beatles, décidera d’enregistrer quelques-unes de leurs chansons. Le résultat : des morceaux plutôt baroques, un style plein d’humour comme la cantatrice le prouve dans les vidéos YouTube. Elle enrichira son répertoire Beatles au fil du temps, tour à tour avec un quartet ou un quintet à cordes et livrera des récitals accompagnée parfois d’un seul piano. I Want To Hold Your Hand, Girl, Ticket to Ride, Eleanor Rigby, Yellow Submarine, et bien d’autres. Son album « Beatles Arias » comporte une douzaine de titres. Georges Martin, leur producteur, qui avait amené les instruments classiques au sein des productions des Beatles a du se réjouir de ce retour.

Des reprises lyriques en forme d’hommage, y compris à l’album Revolver dont ce Revolution de Cathy Berberian reprend les codes graphiques

Les orchestres classiques, hésitants

Les chansons des Beatles ont fait l’objet de reprises amusantes par des orchestres classiques dont les interprétations se répartissent en deux genres : celles qui restent au plus près de l’original en s’adjoignant de bons guitaristes et un batteur rock qui assureront l’essentiel de la partition, les cuivres et cordes jouant les leurs exactement là où les Beatles l’avaient prévu et enregistré.

Finalement, l’intéressant de ces interprétations réside plutôt dans les vidéos, où de toute évidence, certains musiciens se divertissent de ces jeux inhabituels, alors que d’autres s’ennuient à mourir, se demandant ce qu’ils font là. Des réactions qui ne sont donc pas éloignées de celles qu’avaient connues les Beatles, chaque fois qu’ils avaient invité des musiciens classiques à intervenir dans leurs morceaux. Paul était souvent à l’origine de ces incursions dans les instrumentations classiques. Ne sachant pas écrire la musique, il tentait, généralement en vain, d’expliquer aux musiciens de l’orchestre ce qu’il attendait d’eux.  La complicité de George Martin, musicien classique de formation permettait d’annihiler les incompréhensions : le producteur écrivait alors la partition attendue par l’orchestre et l’enregistrement pouvait reprendre son cours.

Deuxième type d’interprétation, celle qui n’utilise que les instruments classiques de l’orchestre classique. Ici, ce qu’apporte la beauté des instruments classiques est un peu dilué par l’absence des guitares électriques et les percussions du rock.

Les Beatles, c’est aussi du jazz

Nombreux sont les interprètes qui ont « jazzifiés » avec talent les titres des Beatles.

Les plateformes proposent en général des compilations de titres, il suffit de rechercher Jazz et Beatles. Voir aussi du côté de Honey Pie, Revolution ou Penny Lane, bref, presque tous les titres des Beatles peuvent se prêter à une adaptation.

Signalé par Philippe G., un lecteur de GenerationBeatles.blog, le formidable travail de Brad Mehldau, un des plus talentueux pianiste de jazz de sa génération, qui revisite et improvise autour de plusieurs titres : Blackbird, She’s Leaving Home, Martha My Dear (le jeu de piano de Paul est brillamment retravaillé), And I Love Her (qui prend un tour plus dramatique), ou Dear Prudence, un titre écrit par Lennon et souvent repris (voir plus bas).

Deux titres des Beatles sur ce brillant album du Brad Mehldau Trio

Encore quelques pistes. Ella Fitzgerald interprète Hey Jude ; Count Basie Yesterday, lui aussi ; comme Ray Charles qui s’attaquera également à Something , Let It Be et Eleanor Rigby ; on pourra aussi écouter Day Tripper, l’autre face du Single We Can Work It Out, par Deborah Dixon.

Diana Krall travaille bien ses Beatles, dans son style : In My Life, Blackbird, And I Love Her, For No One, une très belle interprétation d’une autre superbe ballade de Paul, et l’incontournable Yesterday (voir plus bas) avec James Taylor guitariste et compositeur qui rendra hommage au Something de George Harrison (la plus belle chanson de tous les temps, selon Sinatra qui l’interpréta souvent) en écrivant « Something In The Way She Moves », le premier vers de Something.

Deux albums (ici le second) dont la couverture ne fait pas dans… la dentelle et indique sans subtilité que les interprètes, souvent excellents, sont pour la plupart des femmes. Deborah Dixon, Sarah Menescal, Betty Says, Eve St. John, et bien d’autres. Des sélections qui permettent aussi d’accéder au travail de jazz girls de talent

Parfois, les reprises sont moins talentueuses. George Benson a été tellement inspiré par les morceaux d’Abbey Road qu’il a fait une reprise complète de l’album : « The Other Side of Abbey Road ». Mais ces interprétations n’égalent pas les originales.

L’Amérique Latine

L’Amérique latine n’est pas en reste avec de multiples et belles interprétations. Signalée par une lectrice du blog Michelle P. au prénom si Beatlesien, les interprétations du brésilien Caetano Veloso de plusieurs chansons dont les grands classiques des Beatles mais plus rares : You’re Gone Loose That Girl, Help et Lady Madonna auquel il apporte sa voix de miel et son jeu calme de guitare.

Earth Wind & Fire, jazz et funk, comme toujours

Le guitariste Pablo Pastor du groupe ZikJaz, attire notre attention sur la reprise de Got To Get You into my Life par le groupe de jazz-funk Earth Wind & Fire. Le groupe de Chicago rend ainsi hommage à la belle introduction de la version originale que sa section Cuivres interprète avec le brio qu’on lui connaît. Les chœurs sont puissants et eux aussi habités par ce titre dont on pourrait croire que McCartney l’a écrit pour eux.

MUSIQUE ET CINEMA

Quand les chansons des Beatles inspirent le cinéma

Outre leurs propres films et le très attendu Get Back (une version complétée et revisitée du film Let It Be, voir notre post) les Beatles ont inspiré le cinéma et les illustrations musicales des films. On leur a souvent demandé et parfois obtenu (de Paul en particulier) de composer pour des films, nous y reviendrons dans un prochain post.

Témoignage de la source d’inspiration que sont les Beatles pour le cinéma, le récent (2019) Yesterday, film hommage de Danny Boyle aux chansons des Beatles. C’est d’ailleurs à nos yeux son principal mérite. Il est vrai que pour des spectateurs français, l’uchronie autour de la musique n’a jamais été aussi réussie qu’avec le film « Jean-Philippe » de Laurent Tuel réunissant Fabrice Luchini et Johnny Hallyday. Un Johnny alors plus en forme qu’à l’époque où il traduisait certains hits des Beatles et que seuls les fans absolus de l’idole décédée s’obstinent à trouver meilleurs que les originaux.

Le musicien Ed Sheeran, qui interprète dans Yesterday son propre personnage nous avait d’ailleurs gratifié au cours de la soirée « The Beatles Tribute » (voir plus bas) d’une jolie version de « In My Life ».

Across The Universe

Mentionnons le film de 2007, Across the Universe de Julie Taymor (la réalisatrice de « Frida », film consacré à Frida Kahlo), dont le scénario est construit autour des histoires que racontent une trentaine des chansons des Beatles.
Les deux principaux acteurs Evan Rachel Wood et Jim Sturgess sont aussi les principaux interprètes des morceaux, depuis All my Loving ou Girl jusqu’à Something, en passant par un très réussi Dear Prudence où intervient Dana Fuchs qui livre avec l’aide de Jim Sturgess et Eva Rachel Woods une version qui en restant dans l’esprit de John, se trouve enrichie de multiples instruments et voix. Signalons aussi un étonnant I’m The Walrus que Bono (U2) est venu interpréter comme un Lucy In The Sky. Enfin, Joe Cocker est venu revisiter Come Together, quasi à la hauteur de son With A Little Help From My Friend, voir plus bas. Le titre du film est une superbe chanson de John tirée de l’album Let It Be et magnifiquement interprété par Jim Sturgess.

A nos yeux la production de la B.O. d’Across the Universe est supérieure à celle de la version initiale de Let It Be pour les titres de l’album qu’elle en reprend. En effet, la production avait été confiée à un Phil Spector pas au mieux de sa forme. Les lourds ajouts de chœurs et d’instruments à corde sur quelques titres n’étaient pas du meilleur effet. Let It Be Naked, édité 33 ans après l’original supprimera ces parasites.

Se procurer l’album Across the Universe qui constitue la B.O. du film permet de s’offrir une trentaine de reprises dans l’ensemble toutes réussies tout en restant dans l’esprit Beatles.

Across The Universe, d’autres grandes reprises

Et liaison vers les reprises rock des Beatles, rappelons les autres hommages à ce titre de Lennon par les reprises des deux leaders de Pink Floyd, David Gilmour et Roger Waters, qui chacun, ont interprété ce titre en concert, mais sans égaler celle de feu Kurt Cobain (Nirvana) qui fait la part belle à d’étincelantes guitares en écho à sa voix brisée.

POP ROCK : DES GRANDES REPRISES

Yesterday, la maturité à 22 ans

Retour à l’univers pop-rock où les reprises foisonnent. Compte tenu de leur nombre, nous ne mentionnerons ici que quelques interprètes ou groupes, en commençant par oublier les adaptations traduites, même si les chanteurs français des années 60 et 70 s’en sont donné à cœur joie, sans malheureusement apporter grand-chose aux titres initiaux.

Pour en revenir à Yesterday, personne n’ignore sur cette planète que cette chanson de Paul est avec Hey Jude une des plus connues du groupe. McCartney dit l’avoir entendue en rêve et avoir été longtemps persuadé qu’il s’agissait d’une composition existante et que la produire serait forcément un plagiat. Ce n’est qu’après que son entourage l’ait rassuré sur l’originalité de la composition qu’il se décide à travailler le morceau. Nous sommes en 1965 et Paul l’enregistre quelques jours avant de fêter ses 23 ans. Fait unique, Yesterday est enregistrée sans l’aide des trois autres Beatles qui considèrent avec générosité et lucidité qu’ils n’apporteront rien de plus à la chanson. Paul, sa guitare, sa voix et un quatuor à cordes convoqué par George Martin, rien de plus. Un chef d’œuvre.

McCartney confirmait dans un récent  » Late Show » au Ed Sullivan Theater (celui-là même qui accueillit la première prestation américaine des Beatles en 1964), qu’ayant entendu dire que Yesterday avait fait l’objet de plus de 3000 reprises, il avait demandé alors à quelqu’un de son équipe de lui faire un Top Ten des meilleures reprises de Yesterday. Comme bluffé par lui-même et le prestige des interprètes, il énumère :  Frank Sinatra, Elvis Presley, Ray Charles, Marvin Gaye, cette dernière étant sa préférée, tout en s’étonnant – et en s’en amusant – qu’Elvis, Sinatra et Marvin aient un peu changé les paroles en plein milieu de la chanson…

Sur ces trois mille interprétations beaucoup sont de grande qualité, laissons à chacun et à son moteur de recherche le soin de trouver les plus belles. Signalons quand même le travail de Marianne Faithfull et la toute récente interprétation de Billie Eilish lors de la cérémonie des Oscars de février 2020 en hommage aux récents disparus du cinéma. Le souvenir des personnalités évoquées comme l’interprétation (et comme la composition, bien sûr) se conjuguent pour émouvoir le public. A 18 ans, Billie est la première interprète de Yesterday née ce siècle. Preuve sans doute que la chanson a encore de longues années devant elle.

FILIATION. Billie Eilish interprète la chanson titre « No Time To Die » du James Bond qui sort en novembre 2020. Elle succède ainsi à Paul McCartney qui avait écrit et interprété Live And Let Die, la chanson multi-récompensée (et multi-reprise) de la B.O. du James Bond éponyme.

Fats et Emmylou dans la fidélité

A découvrir aussi, par Fats Domino, une version de Lady Madonna très proche de celle des Beatles, instruments, arrangements, chœurs, piano, on retrouve tout, avec en prime l’inégalable voix de velours de Fats. Quand à Emmylou Harris, la chanteuse folk-country, elle interprète régulièrement For No One, une autre superbe chanson de Paul extraite de Revolver. elle en profite pour rappeler que contrairement à la légende, les guitaristes country savent jouer plus que trois accords. John considérait qu’il s’agissait d’un superbe travail de Paul, qu’il avait écrit alors que sa relation avec l’actrice britannique Jane Asher s’approchait de la fin: « She no longer needs you », Elle n’a plus besoin de toi dit le refrain.

Stevie Wonder l’un des préférés de Paul

Pour McCartney, Stevie Wonder est un génial interprète des Beatles. S’il fallait s’en convaincre, We Can Work It Out en apporte la preuve. Dans ce titre sorti en 1965 en single (avec Day Tripper en « Double Face A », un concept judicieusement inventé par le marketing d’EMI) le génial Stevie Wonder injecte des arrangements, des orgues, des synthés, de l’harmonica et des chœurs puissants. Une belle reprise très Wonderienne, même si on peut parfois préférer les attaques vocales de Paul. Le morceau original comportait déjà une belle dose d’originalité avec l’utilisation d’un vieil harmonium et le pont sous forme de valse. Un bel hommage mais on a le droit de mettre l’original à la première marche du podium.

Dear Prudence, inspiratrice

La chanson écrite par John lors de leur séjour en Inde (voir le post sur Sexy Sadie) et qui pousse la timide Prudence Farrow (la sœur de l’actrice Mia, aussi présente à Rishikesh, le ashram du Maharashi Mahesh Yogi) à aller s’amuser plutôt que de méditer, a inspiré plusieurs artistes : Siouxsie and The Banshee avec une version bien rock), Gabor Szabo assez proche de l’original, Dana Fuchs et Jim Sturgess et Evan Rachel Woods qui restent dans l’esprit de John, mais en livrant une excellente version enrichie de multiples instruments et voix (voir ci-dessus Across The Universe, les Beatles et le cinéma). La version du Jerry Garcia Band, moins originale mérite quand même l’écoute.

Dans le style comédie musicale

En écoutant Ticket To Ride par The 5th Dimension, vous n’aurez pas de difficultés à y retrouver les créateurs de deux des tubes de « Hair », la comédie musicale culte de la fin des années 60, Aquarius et Let the Sunshine in. Une bonne illustration d’une façon assez classique de faire une reprise : prendre une chanson que j’aime ou qui a bien marché (avec les Fab Four, ce n’est pas trop compliqué) et je l’adapte à mon propre style. De ce point de vue l’exercice est réussi. Mais pour ce titre, on pourra préférer la voix de John, le jeu de batterie de Ringo, la basse de Paul et les solos de George.

Beaucoup de morses

A la première écoute de I Am The Walrus, puis à chaque nouvelle écoute, on est bluffé par le génie créatif fulgurant de Lennon, au-delà des paroles déjantées qui avaient pour but essentiel de se moquer des savants commentaires dont John savait qu’ils seraient nombreux. Certes un gros travail d’équipe, outre celui des trois autres Beatles et la réunion de violons, violoncelles, clarinettes et autres cuivres. S’il fallait s’en convaincre, l’interprétation qu’en a fait le groupe de rock progressif britanique Spooky Tooth est une très belle illustration de la puissance rock contenue dans le morceau. A ne pas rater. Une reprise du titre par Oasis lors d’un concert en 1994 à Glasgow (sur leur album Definitly Maybe) est un autre bel hommage des frères Gallagher qui considéraient descendre en ligne directe des Beatles. Il est vrai que le premier morceau appris par Noel Gallagher à la guitare était… Ticket to Ride. Notre très repris Walrus, mérite aussi la vidéo de son interprétation par un Jim Carrey dans son habituel rôle de pitre euphorique et grimaçant qu’accompagne un orchestre dirigé par George Martin lui-même.

Retrouvez sur YouTube la prestation de Jim Carrey, ici avec George Martin

Le Medley d’Abbey Road

Un ensemble de courts titres de choix pour qu’un chanteur puisse challenger l’étendue de ses talents. Du Medley d’Abbey Road, (voir notre post dédié) les reprises pourront être intégrales (les 8 morceaux) ou une partie d’entre eux, Carry That Way, Golden Slumbers, You never Give Me Your Money, Polythene Pam, Mean Mr. Mustard ou The End, notamment. Pour ne citer qu’eux: Steven Styler d’Aerosmith, et ouverture aux purs amateurs, The Barton Hills Choir, une jolie chorale d’enfants qui s’en tirent mieux que le chanteur solo. De son côté, Phil Collins s’en donne à cœur joie avec le seul solo de batterie de l’histoire des Beatles, Ringo, comme les trois autres n’aimant guère l’exercice.

Joe Cocker, dès Woodstock

Avant de parler de quelques concerts, voici le quasi-meilleur pour la fin. Aux spectateurs du mythique concert de Woodstock en 1969, puis au monde entier, le jeune chanteur britannique, 25 ans alors, de la vieille cité minière de Sheffield, échevelé, prognathe et désarticulé offre de sa voix rauque et de son phrasé elliptique une des plus belles interprétations, tous titres confondus, d’une chanson des Beatles. Il en ralentit le rythme, transformant un morceau plutôt guilleret en une complainte désespéré et un appel à l’amitié. L’attaque à l’orgue avec un riff splendide, exercice habituellement réservé aux guitares, l’arrivée de la batterie puis des guitares, ouvrent la voie à… celle de Joe (ou la voix avec un x) puissante, rocailleuse et habitée. Les chœurs puissants ne s’adoucissent que pour demander « Would you believe in a love at first sight ? » (Crois-tu au coup de foudre ?). Comment ne pas l’avoir pour cette interprétation ?

Au fil du temps et des concerts, cette interprétation s’est enrichie de productions qui, lors des concerts, ont enthousiasmé les foules.

Un mot sur le reggae qui n’est pas en reste…

Si les Beatles étaient Jamaïcains, voilà ce que seraient leur version de Hard Day’s Night, Hey Jude, Yesterday, Get Back, Don’t Let Me Down, Carry That Way ou Here Comes The Sun. Bien des titres se prêtent naturellement à une interprétation reggae. Un disque de multi-interprètes à se procurer

LES CONCERTS

Avant d’en venir à deux concerts historiques, mentionnons une reprise du fameux Rooftop Concert où un groupe, Them Beatles, quasi sosies des Beatles, reprend tous les codes visuels et vestimentaires du concert et s’acquitte à la perfection des reprises des chansons interprétées en 1969 par les Beatles réunis pour leur dernier concert public sur le toit de leur maison de disques. Etonnant.

S’il est bien un lieu et un moment où les reprises de qualité fleurissent, c’est à l’occasion des concerts qui célèbrent le travail des Beatles, ou plus tristement la disparition de l’un des membres.

Parmi ceux-ci, deux concerts-hommage permettent d’accueillir de nombreux musiciens qui savent ce qu’ils doivent aux quatre garçons de Liverpool.

Tribute to Beatles

Parmi ces concerts, « The Night That Changed America : A Tribute to The Beatles » 50 ans jour pour jour après la fameuse première apparition des Beatles à la télévision américaine, évoquée plus haut. Pour ne pas être trop long, signalons un joli travail d’Annie Lennox et Dave Stewart d’Eurythmics sur The Fool On the Hill, un des titres de Magical Mystery Tour paru fin 1967. Annie Lennox seule au piano puis rejointe par Stewart à la guitare offre une version puissante d‘une des plus belles ballades de McCartney qui au fil de la chanson se rapproche de l’original (violons, flutes) tout en boostant cette ballade intimiste, c’est son droit.

Au cours du même concert Dave Grohl (multi-instrumentiste, ex-batteur de Nirvana, puis membre de Foo Fighters) et Jeff Lynne (Electric Light Orchestra, puis Traveling Wilburys et producteur de deux titres de l’album posthume des Beatles, Anthology et de Flaming Pie un des meilleurs albums solo de McCartney) célèbrent le groupe et le titre de Lennon en reprenant le chef d’œuvre rock un peu trop méconnu, Hey Bulldog.

Concert for George

Organisé à l’occasion du premier anniversaire du deuxième Beatles a disparaître, de ce concert on peut écouter tout l’album. Chacun ayant à cœur de rendre un joli hommage à leur ami, va rester au plus près de l’interprétation initiale : I Want To Tell You de l’album Revolver), par Jeff Lynne, If I Needed Someone (de l’album Rubber Soul) par Eric Clapton qui interprètera aussi Beware of Darkness, une chanson de George post-Beatles. Le puissant Old Brown Shoe (sorti en mai 1969 en Face B de la Ballad of John and Yoko) est magnifiquement interprété par Gary Broker (musicien britannique de Procol Harum et de son succès planétaire, Whiter Shade of Pale). Tom Petty and The Heartbreakers livrent un énergique Taxman et un Handle with Care qu’il avait composé avec Harrison à l’occasion de la création collective de leur « supergroup » les Traveling Wilburys, réunissant aussi Jeff Lynne, Bob Dylan et Roy Orbison, rien que ça.

L’album et le DVD du Concert For George organisé par sa femme Olivia Harrison, réunissent le gratin des proches de George Harrison : Anoushka Shankar (la fille de Ravi qui lui apprit le sitar), les Monty Python, Tom Hanks, Billy Preston (le magicien de l’orgue et un des rares musiciens avec Clapton à être venu jouer sur leurs albums), et tant d’autres dont Ringo et Paul. Et son fils Dani Harrison

Passons sur la présence de Ringo Starr et de Paul McCartney venus saluer la mémoire de leur ami et comparse avec de fidèles interprétations de titres de celui qui avait su se hisser au niveau des deux compositeurs les plus brillants de leur époque.

While My Guitar Gently Weeps

Dans ce même concert, cette reprise d’un des meilleurs titres de George de l’époque Beatles accueille notamment McCartney au piano, Dhani Harrison (le fils) à la guitare. A la guitare solo, Eric Clapton qui était déjà à la manœuvre sur ce titre de l’Album Blanc, invité par George. On y voit un Clapton au bord des larmes, qui comme sa guitare « Gently Weeps ».

Trop de titres splendides pour les citer tous, et si cet album n’apporte donc pas de réelle nouveauté ou de dimension créatrice exceptionnelle, il constitue une bonne occasion de réécouter les titres composés par George, réunis dans un album plein d’émotion et d’amitié.

Trois ans plus tard en 2004, à l’occasion d’un autre concert, « Tribute to George Harrison », While My Guitar sera joué et réunira entre autres, Tom Petty, Jeff Lynne et Dhani Harrison. Il faut mentionner la prestation de Prince, vibrionnant, élastique, heureux d’être là et qui prouve qu’il était aussi un brillant guitariste en venant poser un magnifique solo qui n’aura rien à envier à celui de Clapton. Au cours de la prestation, Prince viendra s’incliner avec gentillesse devant le fils du Beatle disparu.

Explorer de nouveaux continents

Rien de nouveau à ce que des œuvres musicales de qualité attirent nombre d’interprètes.

Si certains artistes ont voulu miser sur un effet d’aubaine dans la reprise d’un morceau connu, avec pour seul objectif de s’offrir une meilleure visibilité ou de donner un coup de boost à leur carrière, la plupart des artistes qui reprennent les Beatles savent que la tâche peut être ardue et qu’ils seront jugés à l’aune de la réussite ou l’échec artistique de la reprise. Pour beaucoup, il s’agit bien de rendre un hommage aux créateurs et inspirateurs. Et tant mieux si par leurs talents, ils donnent une dimension supplémentaire aux titres et nous emmènent, sur le même bateau, sans doute un sous-marin jaune, explorer de nouveaux continents.

N’hésitez pas à utiliser les commentaires ci-dessous pour nous faire part des interprétations que vous voulez recommander…